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Konakry
8 décembre 2004

RAPPORT MISSIONNAIRE N°1

Antoine et Mayeulle BUREAU

Violaine BUREAU

GUINEE CONAKRY

Dispensaire St Gabriel

Archevêché de Conakry

BP 2016 Guinée Conakry

 

 « Ce n’est pas vous qui m’avez choisis ;<?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" />

Mais c’est moi qui vous ai choisis et vous ai établis pour que vous alliez et portiez du fruit »

Jean 15-16

 

Chère famille et chers amis,

 

Nous sommes arrivés en Guinée le 25 août et le temps avant notre départ a passé bien vite sans nous permettre de vous dire au revoir à tous. Nous avons découvert chacun de vos noms à Paray le Monial, lors de notre semaine de préparation. Nous vous remercions tous pour votre soutien qui nous touche beaucoup et nous permet d’être ici. Par ce rendez-vous trimestriel nous souhaitons vous partagez les joies et les difficultés de notre mission.

 

Avant de vous raconter notre mission, nous allons vous présenter rapidement la Guinée et l’endroit où nous vivons.

 

La Guinée

 

Pays d’Afrique de l’ouest, peuplée d’environ 7.500.000 habitants, la Guinée est un pays très jeune, avec beaucoup d’enfants en bas âge. Au point qu’on a vite l’impression que les enfants sont plus nombreux que les adultes. La Guinée est également une mosaïque ethnique, avec trois ethnies dominantes, Soussou, Malinké et Peulh ; ainsi que plusieurs autres ethnies dites forestières ou côtières (Kissi, Toma, Guerzé, ou encore Baga). Le président actuel de la république est Soussou, ce qui ne contribue pas forcément à rendre cette ethnie appréciée des autres. Sékou Touré était Malinké et aucune ethnie n’admettrait un Peulh comme chef d’Etat. Les Peulh détiennent jalousement le monopole du négoce du riz dont le prix ne cesse de croître depuis quelque temps. Voilà ce qui peut donner une certaine idée de l’extrême diversité de population rencontrée ici, même si Conakry, métropole de plus d’un million d’habitants atténue quelque peu les antagonismes.

 

Ce pays est majoritairement musulman, ce que l’on aperçoit très rapidement. La journée est rythmée par les appels du muezzin, dès 5 heures du matin. Comme nous n’avons pas d’autres fenêtres qu’un voile de moustiquaire, nous pouvons entendre plus ou moins distinctement ces appels selon qu’il y a de l’électricité ou non. En réalité, il est plus exact de dire que les ethnies majoritaires sont musulmanes, et par réaction, les autres (forestiers ou côtiers) se disent chrétiens. Cependant l’islam et le christianisme n’ont pas totalement supprimé les pratiques animistes. Ainsi, on voit beaucoup d’enfants portant des colliers ou des ceintures servant de gris-gris.

 

 

 

La Guinée est aussi un pays encore malade de la dictature révolutionnaire de Sékou Touré. La collectivisation des fermes a perturbé les habitudes séculaires de culture et d’alimentation. Le camp Boiro, goulag installé au cœur de Conakry, a laissé une empreinte douloureuse et résignée dans chaque famille guinéenne. Aujourd’hui ce camp est désaffecté, mais en passant en centre ville, on en voit encore les murs abandonnés, comme signe d’un passé que personne n’ose effacer.

 

Conakry

 

Conakry, capitale de la Guinée, est située en bord de mer. Elle présente des paysages magnifiques, malgré une architecture très pauvre. Il n’y a que très peu d’immeubles, et la plupart des constructions sont très sommaires. Conakry est traversée par quatre grandes artères goudronnées. Le reste des routes est très abîmé par le climat et le manque d’entretien. La circulation est très dense, et composée de deux grandes variétés de véhicules : les unes ressemblent à des épaves ayant subi des réparations à l’infini, la majorité étant de vieille Renault 12. Les autres sont des énormes et magnifiques voitures 4x4 asiatiques, appartenant soit à des dignitaires ou favorisés du régime en place, soit à des ONG, très nombreuses ici (sans doute l’efficacité des ONG se mesure à la grosseur de leur voiture…)

 

L’équipe de coopérants FIDESCO

 

Nous avons retrouvé sur place Frédéric (gestionnaire) et Clémence (infirmière) son épouse, présents ici depuis un an. Nous sommes venus avec Tanguy (infirmier). Lise (infirmière) nous a rejoint le 7 septembre. Nous attendons encore David (maintenance des bâtiments) et Frédéric (médecin).

 

Chaque matin, nous disons les laudes avec nos voisins les célibataires. Tous ensemble, nous avons une fois par semaine un temps de prière et d’adoration dans la petite chapelle de la maison des célibataires, suivi d’un temps de partage. Cette prière commune est le cœur de notre vie en équipe et nous permet de vivre ensemble notre mission.

 

Notre lieu d’habitation

 

Nous habitons une concession située à COCOBUNI KOLOMA, quartier populaire de Conakry. Il s’agit en fait de deux maisons dans un petit enclos muré. Les maisons n’ont pas d’étage et le confort y est très relatif. Toutefois, il est sans comparaison avec certains de nos voisins. Pourtant malgré leurs conditions de vie difficiles, les familles qui nous entourent nous accueillent chaleureusement et avec beaucoup de simplicité.

 

Nous aimons beaucoup nous promener avec Violaine portée sur le dos par Mayeulle, le long de la route qui borde notre quartier. De cette route nous pouvons voir la mer. Cette promenade nous permet d’aller rendre visite aux familles voisines. Nous allons ainsi voir Binta, couturière Peulh, bien connue des coopérants FIDESCO. Derrière son petit atelier en tôle, nous allons visiter Hortense et Mariame, deux jeunes mères de famille Baga, entourées joyeusement et bruyamment de leur nombreux enfants. Nous aimons rester prés d’eux, assis dans le petit atelier de Binta ou sur les sièges en plastique devant les petites maisons d’Hortense ou Mariame.

 

 

La mission au dispensaire Saint Gabriel

 

Le dispensaire Saint Gabriel de Matoto existe depuis 1987. Il a pour vocation d’apporter des soins aux plus pauvres pour des tarifs peu élevés. La maternité a ouvert ses portes en janvier 2002. Elle est composée d’un service de consultations prénatales et curatives, d’une salle d’accouchement, et de dix lits d’hospitalisation. Il y a environ 60 accouchements par mois et 50 consultations par jour. Le but est de permettre aux femmes de faire suivre leur grossesse et d’accoucher dans de bonnes conditions. Bien souvent, elles accouchent dans leur propre quartier, au risque de leur vie et de celle de leur enfant. Dès que la grossesse est compliquée d’une pathologie ou que l’accouchement est à risque, les femmes sont référées (transférées) au centre hospitalier de Conakry.

 

J’ai intégré l’équipe de sage-femmes le 1er septembre 2004 succédant à Edith, précédente sage-femme responsable. L’équipe comprend quatre sage-femmes (Eliane, Alphonsine, Jeanne et Marie-Claire) et quatre matrones (Jeanne, Cathy, Catherine et Jocelyne). Notre journée commence par une louange avec tout le personnel du dispensaire, puis chacun va occuper son poste. Pour le moment j’observe leur manière de faire. J’apprends à connaître chacune d’entre elles, et cela ne peut se faire qu’avec le temps ! Le travail est à la fois le même qu’en France et à la fois très différent. Ici la majorité des femmes sont excisées. Toutes les femmes accouchent sans perfusion et se lèvent quasiment immédiatement après l’accouchement. Le courage de ces femmes m’impressionne beaucoup.

 

Je suis souvent en consultation prénatale où j’essaie tant bien que mal de faire l’interrogatoire en Soussou. La plupart du temps, les femmes viennent en consultation parce qu’elles sont malades (entre autre le paludisme) Nous profitons de ces consultations pour faire des causeries c’est-à-dire des petites préparations à la grossesse, à l’accouchement et à l’allaitement. C’est aussi l’occasion de leur montrer l’intérêt d’un suivi régulier et préventif de leur grossesse.

 

En arrivant, j’ai été très frappée de voir qu’il fallait faire ici beaucoup d’éducation en matière d’allaitement. Il faut expliquer aux femmes qu’elles doivent allaiter pendant les six premiers mois, sans ajouter ou remplacer le lait maternel par de l’eau ou du lait en poudre. Les femmes ont du mal à croire que leur lait est suffisant pour nourrir leur enfant.  

 

Tous les mois je fais aussi les statistiques de l’activité de la maternité, de la consultation ainsi que la consommation des médicaments et du matériel. C’est une partie un peu plus ardue pour moi mais qui finalement est très intéressante.

 

La mission à l’archevêché de Conakry

 

L’archevêché est situé dans le centre ville à une quinzaine de kilomètres de notre lieu d’habitation. La situation y est très délicate en raison d’une période d’un ou deux ans sans archevêque à sa tête. Monseigneur Robert Sarah, précédent archevêque n’a pas été immédiatement remplacé. En son absence, beaucoup de choses sont restées à l’abandon. Certains en ont profité pour oublier l’intérêt de l’archidiocèse, préférant celui de leur famille. Monseigneur Vincent Koulibaly, nouvel archevêque a donc fort à faire, d’autant que le diocèse de Kankan, dont il était l’évêque, est toujours vacant. L’actuel procureur de l’archidiocèse est le Père Robert Michaux, prêtre français, fidei donum du diocèse de Poitiers et seule personne de confiance de Monseigneur Vincent Koulibaly. La comptabilité n’est tenue que depuis l’an dernier. Les années antérieures ne sont pas reconstituées. Compte tenu de cette situation, mon travail n’a pas commencé. Je devrais en principe m’occuper de gestion du réseau santé du diocèse. Mais auparavant l’archevêque doit procéder à une remise en ordre qui tarde à intervenir.

 

En attendant, j’aide Frédéric (gestionnaire) au dispensaire. Je mets en place l’informatisation de la gestion des stocks de médicaments. Parfois je l’accompagne dans ses démarches de commande et de livraison de médicaments. Les médicaments sont envoyés par container d’Anvers. Et bien souvent, le container est déjà arrivé depuis un mois avant d’avoir fini le tour des différents bureaux administratifs pour obtenir le visa d’importation, l’exonération de taxe et l’autorisation de sortie du port.

 

La sortie du port de commerce des cartons de médicaments est d’ailleurs un moment épique. Il faut recompter toutes les boites de médicaments, en ouvrant les cartons un par un pour être sur que rien n’a disparu. Compter les boites de médicaments, tout en vérifiant que personne dans son dos, ne prend une boite dans un carton déjà compté. Le port de commerce est devenu avec le temps un immense terrain vague, lieu d’important trafic. Les douaniers à l’entrée du port demandent toujours un peu d’argent pour faciliter les opérations. Parfois on est surpris de voir des voitures de particulier sortir du port avec, discrètement camouflés dans le coffre, quelques cartons bien rangés.

 

Ces moments sont aussi l’occasion de rencontres étonnantes. Après avoir chargé la voiture avec les cartons de médicament, je me suis fait interpellé doucement par un homme « docteur ! docteur ! » Je prends deux minutes pour aller le voir et après s’être assuré que nous étions bien du dispensaire Saint Gabriel, il me montre sa cheville où l’on pouvait voir les premiers signes d’une infection lépreuse. Il me dit : je ne sens rien mais je sais bien qu’il faut que je sois soigné. Je ne peux rien faire, je ne suis pas médecin mais je le regarde et j’essaie de lui sourire. Je lui dis de venir au dispensaire où je l’assure qu’il sera bien reçu. Au milieu de tous les trafics, la pauvreté et la misère humaine…

 

Le samedi à la prison de Conakry

 

Le samedi matin nous nous relayons pour aller à la prison donner des soins aux prisonniers. Comme beaucoup d’endroit ici, la prison ne ressemble pas à ce qu’on peut imaginer. Il s’agit d’un ensemble de bâtiments poussiéreux, encerclé par un haut mur. Au centre, trois bâtiments en étoile autour d’une petite cour rectangulaire, constituent la prison. Ces bâtiments sont traversés par un long couloir et de chaque côté sont situées les cales dans lesquelles vivent les prisonniers. Ils y vivent parfois à plus de 50 dans 25/30 mètres carrés. Ces pièces ne sont éclairées que par une ouverture fermée par des barreaux, d’environ un mètre carré, à plus de trois mètres du sol.

 

Nous y rejoignons Karim Younès, bien connu des coopérants fidesco. Avec lui nous allons donner des soins dans chacun des trois couloirs, l’un après l’autre. Nous commençons les soins vers 10 heures, pour les terminer vers 15 heures. Le bruit des portes ou des grilles qui claquent sans arrêt ne couvrent pas toujours les cris et les disputes entre prisonniers. En raison du manque d’hygiène, les prisonniers ont de nombreuses infections de la peau (gales, mycoses, etc.). Les coopérants infirmiers soignent les plaies les plus profondes tandis que ceux qui ne sont pas infirmiers comme moi, soignent les infections de peau. Les plaies les plus impressionnantes sont celles causées par les liens qui les ont attachés pendant plusieurs jours, les coudes maintenus serrés dans le dos. Ces plaies laissent des cicatrices très impressionnantes sur les bras. Elles seront le signe visible et indélébile de leur état de prisonnier, excluant toute possibilité de réinsertion.

 

J’aime prendre un peu de temps pour discuter avec eux. Les rencontres sont brèves, souvent couvertes par le bruit, mais elles sont parfois simples et vraies.    

 

Et Violaine notre petit bébé

 

Violaine s’est acclimatée assez vite à cette nouvelle vie, sans souffrir de la chaleur. Elle est la grande attraction du quartier et de la paroisse où il n’y a pas d’autres européens que notre équipe de coopérants fidesco. Les petits enfants à la sortie de la messe, très intrigués, viennent nous demander si c’est une poupée.

 

Elle tient assise et commence à se déplacer à quatre pattes sur le ventre. Elle rit aux éclats à la vue de Vermox, le chien de la maisonnée. Bref, elle toujours aussi mignonne, et fait notre grande joie et aussi celle des autres coopérants !

 

Voilà un petit aperçu de notre mission et nos premières impressions. Nous espérons que vous allez tous bien. Nous attendons avec impatience de vos nouvelles et vos intentions de prières. Nous vous remercions encore de votre générosité sans laquelle nous ne pourrions être ici. Nous vous prenons chacun dans notre prière et nous nous confions à la vôtre.

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Commentaires
J
Bonjour. Je viens d'arriver a votre page. Moi Aussi je suis allé cet été dernière en Conakry pour y travailler comme benevole. Moi aussi j'etais logé à Koloma. Je voudrais vous contacter et savoir un peu plus de votre experience. Je voudrais y retourner l'été prochaine... Je vous remercierai n'importe quelle information.<br /> Joyex Noël!!<br /> A bientôt!<br /> Javier Barrado (Espagne)<br /> fbarrado@able.es
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